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    Blaise RIGAUD et Abel PLISSON (1921-1944)

    Photo de 1931-1932 : M. FOSSE, B. RIGAUD (2e en partant de la gauche) et A. PLISSON (3e en partant de la gauche) – Archives municipales de la ville de Limay

     

    Blaise RIGAUD et Abel PLISSON sont tous deux nés en 1921. Ils grandissent à Limay, fréquentent  l’école Ferdinand Buisson et ont le même instituteur, Monsieur Edouard FOSSE. Camarades d’école durant leur enfance, ils se retrouvent et unissent leur force pour combattre dans la résistance.

    Trousse d’écolier d’Abel PLISSON – Collection famille PLISSON

    Tous les deux obtiennent  leur certificat d’études et entrent dans la vie active en tant qu’ouvrier. Lorsque la deuxième guerre mondiale débute, Abel et Blaise sont âgés de 19 ans. Etant trop jeunes pour être mobilisés, Blaise RIGAUD travaille alors à La Cellophane à Mantes-la-Ville et Abel PLISSON est manœuvre. En novembre 1941, sous l’occupation, ce dernier travaille au sein de l’entreprise TOUCHARD comme l’atteste son laisser-passer de nuit qui l’autorise à circuler entre 3h et 5h du matin.

    Source : Base documentaire du Mont valérien

    Les deux jeunes hommes s’engagent dans le réseau de résistance Mantais  « BuckMaster » au cours de l’année 1943, ainsi qu’un autre limayen, Jean PARANT. Ce réseau  dépend des services de renseignements britanniques et est affilié au F.F.I, sous l’appellation du groupe  « JEAN MARIE ». Ce réseau obtient en 1943 deux parachutages d’armes venant de Londres. Il participe également à divers sabotages dans des usines de la région Mantaise qui contribue à l’effort de guerre allemand. Ce qu’ils ignorent, c’est que le réseau a été infiltré par le contre-espionnage allemand, comme le montre ce schéma du réseau établit par la police.

    L’enquête, rapidement menée, aboutit à l’arrestation de la plupart des membres du réseau. Jean PARANT, prévenu à temps s’enfuit ce qui n’est pas le cas d’Abel PLISSON et Blaise RIGAUD qui sont arrêtés par la police française sur leurs lieux de travail respectifs le 19 novembre 1943. Les deux jeunes hommes sont d’abord livrés à l'administration française qui les interrogent puis écroués à la prison de Mantes-la-Jolie jusqu’au 3 janvier 1944. Au cours de leur interrogatoire, très certainement sous la contrainte, ils reconnaissent avoir participé aux opérations de sabotages industriels. À partir du 3 janvier 1944, ils sont transférés par la police française à l'autorité allemande et emprisonnés à Fresnes (prison sous autorité allemande). Pendant leur détention, Blaise Rigaud occupe la cellule n° 430 et Abel Plisson la cellule n°17.

    Le procès d’Abel et de Blaise a lieu le 23 ou le 24 mars devant le tribunal de la Feldkommandantur de Saint-Cloud. Les procès organisés ne laissent aucune chance aux accusés qui sont « défendus » par des avocats allemands. Abel et Blaise sont condamnés à mort pour motif « recel d’armes parachutées et sabotage de matériel ». La décision ne faisant l’objet d’aucune possibilité d’appel.

    Face à cette sentence, âgés seulement de 22 ans, les deux jeunes hommes font preuve d’un grand courage. Blaise RIGAUD, lors de la dernière visite de ses parents, a la force de rassurer les siens. Abel PLISSON quant à lui occupe ses dernières semaines de captivité à broder en cachette sur un sac de linge avec des fils arrachés à sa couverture, un arc de triomphe où sont inscrites la devise républicaine ainsi que l’inscription « Je combats pour la Liberté ».

    Cette broderie est conservée depuis précieusement par la famille d’Abel qui l’a très généreusement donnée à la Ville de Limay en 2018.

    Broderie d’Abel PLISSON – Collection Famille PLISSON

    Le jour même de leur exécution, le tribunal de la Feldkommandantur avertit de Préfet de Seine des faits. Source : base documentaire du Mont Valérien

    Au matin du 31 mars 1944, ils sont conduits à la carrière du Mont Valérien pour y être fusillés. Là, devant la mort, tous les deux manifestent une nouvelle fois la preuve de leur indomptable énergie. Blaise Rigaud refuse de se laisser bander les yeux ; Abel PLISSON marche au poteau d’exécution en chantant.

    Une fois exécutés, comme l’atteste les documents d’archives ci-après, leur décès est constaté par un médecin allemand. Ils sont ensuite emmenés jusqu’au cimetière d’Ivry pour y être inhumés.

    Le Préfet de Seine et Oise envoie au Maire de la Ville pour l’informer du fait, une simple note où est indiqué :

                « Je vous prie de bien vouloir aviser les familles des intéressés, avec tous les ménagements d’usage, du décès de MM.PLISSON Abel et RIGAUD Blaise, fusillés par les autorités allemandes le 31 mars 1944 à Suresnes ».

    C’est donc au Maire de Limay, Monsieur André LECOQ, que revint la lourde charge d’annoncer aux familles le décès de leur fils.

                Limay et le Mantois sont libérés des allemands le 21 aout 1944. Une fois la paix revenue, très rapidement la Ville de Limay souhaite honorer ses martyrs. Lors de sa séance du 28 octobre 1944, le conseil municipal prend la décision d’inaugurer deux rues de la ville à leur nom lors de la cérémonie du 11 novembre 1944. La sente des Champarts où habitait la famille PLISSON devient alors « rue Abel PLISSON » et la rue Blaise RIGAUD  remplace celle du Maréchal PETAIN. Il est également rapidement décidé de rapatrier du cimetière d’Ivry au cimetière de Limay les corps d’Abel et de Blaise.

    D’abord prévues le 23 novembre 1944, les obsèques sont repoussées au 6 janvier 1945 en raison de la crue de la Seine. Nos deux fusillés du Mont-Valérien, Abel Plisson et Blaise Rigaud, ont ce jour-là une cérémonie officielle rendant hommage à leur courage. Toute la ville, les personnalités politiques locales, leurs compagnons d’armes, les représentants d’associations de combattants, leur famille et leurs amis les accompagnent.

    Les deux cercueils sont exposés à l’hôtel de ville avant la cérémonie – Collection PLISSON

    Ils reposent désormais côte à côte dans le cimetière de Limay.

    Après le temps du deuil, vient le temps de la reconnaissance de la France pour leur engagement à titre posthume. Unis dans la mort, ils le sont aussi dans les titres et hommages reçus à titres posthumes.

    Ils reçoivent tous les deux la légion d’honneur, la Médaille de la Résistance Française, sont promu au grade de « sous-lieutenant » et de chargé de mission « 3e classe » au sein du Groupe « Jean Marie »  et reçoivent le titre « d’interné résistant ».

    Leurs deux noms figurent sur le Monument aux Morts de Limay

    Depuis 2003, leurs noms figurent également sur le Monument national rendant hommage aux 1008 fusillés du Mont-Valérien. Leurs noms apparaissent à la date du 31 mars 1944

    L’artiste, l’architecte Pascal CONVERT, a choisi la cloche comme symbole universel pouvant par exemple évoquer le tocsin aux morts. Posée sur le sol, elle devient le symbole du silence.

    Remise de la broderie à la mairie de Limay par la famille Plisson - 01/06/2018

    Sources : Archives municipales, Ville de Limay.